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James Germain : Le vodou peut jouer un rôle catalyseur et rassembleur dans la solution de la crise

Le musicien haïtien  passionné du Vodou, James Germain a été au Bénin depuis le début  du mois de Janvier pour la matérialisation de  son  projet  emblématique  baptisé  symboliquement «Tambours sacrés d’Haïti». Il en a profité pour  prendre part à différents  évènements majeurs durant son passage sur la terre des ancêtres notamment: la fête nationale du Vodoun, le 10 janvier,  la 25e édition du devoir de mémoire à Ouidah le 17 janvier,  le Concert Diner  Jah Band  au centre culturel  Africa Sound City le 23 janvier et la nuit des idées  à  l’Institut  français du Bénin le 28 janvier. Le dimanche 31 Janvier avant son départ pour la République Dominicaine, notre journaliste Dimiconov DOR l’a rencontré. Entretien.

Palmes Magazine : Quel est le vrai motif   de votre séjour au Bénin ?

James Germain : Précisément, je suis au Bénin dans le cadre d’un projet connu sous le nom des Tambours sacrés d’Haïti qui est financé par Kore Kilti,  l’Union Européenne et Rhum Barbancourt.

Fondamentalement, c’est quoi l’objectif de ce projet ?

Ce projet Afrique-Caraïbe  vise à  identifier les  liens qu’il y a entre les tambours haïtiens  et ceux du Bénin. D’abord, nous avons filmé à  Saint-Domingue, pris des images à Port-au-Prince et enfin nous sommes au Bénin maintenant pour déterminer  quelles sont   les relations existant entre les tambours haïtiens et les tambours béninois. Mon co-directeur artistique Maksaens Denis et moi avons rencontré des personnalités du monde culturel béninois pour réussir ce projet. Alors, on se rend compte qu’il existe un lien très fort entre eux sur ce point. Bien  évidemment, il s’agit d’un rapport historico-culturel entre Haïti et l’Afrique.  Par exemple, dans le Vaudou,  Hogou bada gri  est le nom d’une ville au Nigeria.

Vous  avez pris part le 10 janvier dernier à  la fête nationale du Vodoun instaurée par  le président  Nicéphore Soglo. Comment avez-vous  vécu cet  évènement?

Je participe  pour la première  fois à   cette fête qui attire d’habitude  la grande foule. Mais cette année, la fête  est très spéciale en raison de la pandémie de coronavirus.  Il n’y a eu  pas beaucoup de gens. On n’avait pas vraiment accès à  la cérémonie. On allait aux temples et on assistait  aux cérémonies de singletor, esprit de la nuit. La fête  nationale du vaudou est célébrée  depuis 1993 chaque 10 janvier au Bénin et rassemble les différents  cultes du pays. On célèbre  les divinités du vaudou en signe d’hommage aux forces de la nature et de gloires à  nos ancêtres selon la tradition.  C’est bien d’aller sur le territoire des ancêtres pour voir plus de choses. Au bénin, il y a le respect des traditions.

Le 17 janvier, vous avez assisté  à  Ouidah à la 25e édition du devoir de mémoire ? Pourriez-vous partager cette expérience avec nos lecteur.trice.s ?

Tout ce qui concerne Haïti,  pour honorer  la mémoire de nos ancêtres, je suis là comme concerné.  J’ai une implication directe  dans tout ce qui fait l’honneur et la fierté de mes ancêtres et de  ma chère patrie Haïti. Cet évènement historique est la marche du repentir et du souvenir. Il y a eu une marche au cours de laquelle il y a eu un discours fondamental et rassembleur, un échange très édifiant entre nous. Il y a eu aussi  la cérémonie de  libation  très  bien organisée  qui a été l’occasion de rendre un hommage bien mérité à nos ancêtres et à la république d’Haïti pour ce qu’elle symbolise dans l’histoire. J’ai rencontré  la présidente de l’Association haïtienne au Bénin (AHVAB) Madame Marie- Margarète   Molnar et d’autres compatriotes.  J’ai été très  honoré comme  Haïtien.

Vous étiez  invité spécial au Concert Diner Jah Band au centre culturel Africa Sound City le 17 janvier passé ? Comment a été cette activité ?

Jean Baba est un artiste béninois que j’ai rencontré en Haïti. On tient une amitié. Quand il sait que je serai au Bénin,  il me propose de faire un concert le 17 janvier. Ca été vraiment cool et très intéressant. Avec un accueil très chaleureux du grand public, on a offert une excellence prestation. On peut dire que  c’était un concert  richissime en animation et en couleur car il réunit des personnalités issues un peu partout dans le monde- des continents représentés- des invités de marques et  très spéciaux avec  la bonne musique  et la  bonne bouffe.

Le 23 janvier,  à  l’Institut français du Bénin, vous étiez  à la nuit des idées. Dites à nos lecteur.trice.s comment a été cet évènement  culturel organisé  par l’IF Bénin?

Chaque année, l’Institut Français du Bénin organise cette activité. L’IFB questionne les circulations poétiques, des esthétiques et des imaginaires dans cet Atlantique qui touche l’Afrique, l’Europe et les Amériques. C’était une belle expérience d’y participer. Il y a eu la performance  des chants sacrés du bénin (les sœurs Teriba) et  d’Haïti, des chants et danses cérémonies  avec les Pépit’Art du bénin,  la performance chorographique live  et art numérique avec  Rachelle Agbossou béninoise, Céline Coyact Française, Marcel Gbeffa  béninois et Maksaens Denis haïtien. Il y a eu des débats éclairés autour « du patrimoine culturel immatériel : Connaitre, conserver, transmettre»  et  de « la circulation atlantique et actualisation artistique du sacré  et à l’ancestralité». Il y a eu aussi des paroles d’artistes autour  «du  Patrimoine et création contemporaine : artistes, créateurs, chercheurs et passeurs ». La nuit des idées  a été une activité  de grande envergure au cours de la laquelle  j’ai rencontré des grandes personnalités du monde culturel, des chorégraphes, des danseurs et des talents du monde.

Quel  le rôle que le vaudou pourrait jouer  en Haïti  dans la crise actuelle?

Le rôle que devrait jour le vaudou dans le pays, il ne le fait pas. On voit toujours la sorcellerie quand on parle du vaudou. Il y a beaucoup de vodouisants qui ne savent pas l’histoire du vaudou.  On associe le vaudou à tout. Pourtant, vaudou c’est honorer des êtres ancêtres. Dans le vaudou se développent beaucoup des sciences : médecine traditionnelle, feuille médicinale. Vaudou c’est la connexion avec la terre. Pour Haïti trouver l’unité, il faut donner au vaudou  sa vraie place. La science vaudou qui vient de l’Afrique, nous devons en faire usage à bon escient. Tous les Haïtiens doivent respecter leurs traditions, les aimer et savoir ce qu’ils sont et connaitre leurs racines.

 Le vaudou peut jouer un rôle catalyseur et  rassembleur dans la solution de la crise. Mais c’est très difficile en Haïti. Même ceux au sein du secteur vaudou ne sont pas unis. Le Vaudou peut faire beaucoup de choses. C’est un mode de vie. L’enseignement du Vaudou doit être  mis en place au point de vue historique. On doit utiliser la force du Vaudou pour  des causes nobles. Mais les députés, présidents et autres  se servent de la force du vaudou comme tremplin pour prendre et chercher du pouvoir au lieu d’en faire usage  pour se soutenir,  s’organiser et  s’unir. La tour Eiffel ne se construit pas en une journée. Il y a une volonté des vodouisants pour  la mise sur pied d’un groupe  vaudou contre le kidnapping. J’espère que ça va marcher.  Il faut utiliser cette force libératrice et  cette énergie salvatrice que nous avons en commun : le vaudou.

Quelle est votre histoire avec le Bénin ?

Une expérience extrêmement riche. Avec cette expérience, je me rends compte qu’il n’y a pas de frontières entre ce qui passe en Haïti et le Bénin. C’était très intéressant de voyager au Bénin. Lors de mon premier voyage ici, je n’ai pas eu le temps de faire trop de rencontres, de spectacles. J’apprends beaucoup de chose ici. Il y a une richesse culturelle qui m’intéresse beaucoup. Les afro-descendants doivent retourner à leurs sources pour reconnaitre leur identité qui est leur passeport. Je me sens bien ici et je les invite à venir aussi sur la terre ancestrale. En réalité, pas seulement au  Bénin mais aussi au Togo,   au  Ghana,  au Mali, au Sénégal, en  Côte-d’Ivoire, en gros  en Afrique. Nous avons une histoire particulière et commune.  Retourner à la source qu’est l’Afrique c’est ce  qu’il nous faut les fils et filles d’Africa et de sa diaspora. Nous-mêmes de la diaspora nous ne connaissons pas notre racine. Avec des tests ADN, on peut retracer nos origines comme afro-descendants.  Il y a travail à  faire en ce sens au niveau de l’État. Nous n’avons pas les moyens pour trouver nos origines certes  mais les registres sont là.

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