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« Rosalie l’Infâme », un roman qui dépeint la soif de liberté des esclaves

Édité une deuxième fois par lAtelier jeudi soir, « Rosalie l’Infâme » est le premier roman dEvelyne Trouillot paru aux Editions Dapper en 2004. Se basant sur l’époque coloniale, ce roman habille lesclave et son besoin de liberté des plus fines émotions.

 Les chaînes, la terreur et la mort ont vu Lisette naître dans cette colonie française qu’était Saint-Domingue. Orpheline, elle est élevée par Man Augustine et Grann Charlotte. Sur l’habitation Fayot, la mort joue au corps à corps avec les esclaves. Pour se défendre, l’empoisonnement et la sorcellerie deviennent des moyens efficaces; hantise des colons. C’est pourquoi dans la demeure des Fayot, les aliments sont goûtés avec d’être servis. Manon est cette fille qui « mange chaque jour avant les maîtres ». Comme disait l’article 44 du code noir, l’esclave constitue un bien meuble. 

Le maître a le pouvoir total sur son corps. Les méthodes d’achat en disaient long de cette représentation. C’est d’ailleurs la plus humiliante qui soit. On les faisait ouvrir la bouche pour examiner leurs dents. On les crachait aussi au visage pour marquer la distance entre eux et le  maître. Et à la fin, on les marquait des lettres L.R. Avant l’achat, les traitements ne contenaient pas moins d’humanité dans les barracons. Les esclaves étaient juste entretenus pour favoriser la vente. Il ne fallait pas qu’ils paraissent « trop faméliques aux yeux des acheteurs. »

 Malgré tout, la maladie, les saisons, les châtiments ne pouvaient suffire pour les empêcher de rêver de liberté. Certes, les fouets mettent à nu leur chair mais pas leur âme. Ils revendiquaient leur droit à la liberté au mieux qu’ils pouvaient. La nourrice de Lisette en est un exemple concret. Elle s’est tuée juste après l’avoir allaitée. Gracieuse est morte d’une huitième tentative d’avortement. Elle ne voulait pas porter l’enfant du maître en ayant le statut d’esclave. Quant à Lisette, elle alla jusqu’à avoir une aventure avec un nègre. Elle semblait enfouir toutes ses peines dans cet homme. Sans réserve, elle se donnait en entier. Elle partageait aussi une complicité avec Michaud, ancien commandeur devenu intermédiaire entre les esclaves et le marronnage. Ce besoin de liberté était si fort qu’elle est devenue aussi une intermédiaire.

 Cependant, la liberté a un prix. Certains esclaves l’acquièrent après des années de dur labeur; d’autres, au prix fort de leur sang. Certains dénoncent, d’autres tuent. C’est le cas de Clarisse qui dénonce Lisette pour conspiration. Les mains de cette dernière ont dû serrer le cou de Clarisse jusqu’à ce qu’elle se vide de tout souffle. Elle prend aussitôt le chemin du non-retour. Enceinte, elle était déterminée à offrir à ce petit être un avenir certes incertain mais loin des cloisons et des matraques : « Enfant créole qui vit encore en moi, tu naîtras libre et rebelle, ou tu ne naîtras pas ».

 Certes, L.R ou La Rosalie n’est pas assez décrite dans le roman mais elle est incarnée en chaque esclave. Elle traduit l’acharnement des colons sur les noirs et sur leur territoire qui ne sauraient s’expliquer vraiment en des mots. Elle n’existe plus aujourd’hui mais quand en est-il des séquelles? La violence et le profit dirigent encore les rapports entre pays. De nos jours, être noir c’est être prisonnier. C’est la privation du droit de se battre même pour son propre corps. L’époque coloniale qui persiste encore. À la seule différence, les cloisons ne semblent contenir aucune limite. À l’honneur à la 7e édition du Marathon du livre, les participant.e.s auront la possibilité de découvrir ce roman historique de 119 pages d’Evelyne Trouillot qui fait éloge à la liberté.

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